entræves

PREFACE

Ce blog a pour but de partager un processus créatif en cours,
débuté le 3 janvier 2017avec ces mots:

entr[ê]ves est une enquête sur les marques d'une Europe aux couleurs hivernales,
un voyage identitaire entre traditions masquées et réalités décharnées.

A la lisière du sauvage puissant, vivant, renaissant et du fantôme mortifère
qui ne sait plus de quoi il se nourrit: constater, prendre notes, sons, images.

Une balade sur nos frontières barbelées et insensées, pour une future restitution 

publique et subjective.

Qu'est-ce que la frontière?
Un signe de séparation, une arque d'identité?
Un creux, un plein?
Une peau, une surface, une membrane qui me différencie
de l'Autre et me permet de prendre place?


          Qui est l’étranger ?
          Celui que l’on rejette, celui derrière lequel on se cache,
          ou celui grâce auquel on sent et l'on sait notre contour?
          Qui est le sauvage?
          Qui est le civilisé?
          Qui "peut"?
          Qui croit?

(...)
Depuis lors, j'y dépose mes réflexions ainsi que le matériel récolté dans mon travail "d'enquête"
qui a débuté par un voyage de deux mois (janvier-février 2017) sur les contours
de la France et s'est d'abord articulé autour de deux axes:
  • récolte de témoignages dans divers pays d'Europe autour de la question des frontières
"Je désire créer une photographie transculturelle et intergénérationnelle sur la conception
de frontière et sur les limites de l'Europe.
Pour ce, je réalise tout mon voyage en blablacar et propose des entretiens semi ouverts (enregistrés)
durant plus de 5000km" (cf rubrique "récits")
  •  étude des carnavals de différents pays d'Europe (Suisse, France, Catalogne, Pays Basque, Argentine, Uruguay)
"Je conçois le carnaval comme le rituel collectif, révélateur des enjeux identitaires propres
à chaque ville ou village, à chaque temps, à chaque moment.
Il est LE lieu où il est permis de "déjouer" collectivement les normes d'une société, où l'on peut
traverser, transcender, provoquer les frontières sociales et individuelles (travestissement, transe...).
Je m'intéresse au pouvoir de la symbologie comme indicatrice, révélatrice des frontières sociales et culturelles." 
............................................................................................................................................................

ETAPE DE TRAVAIL DECEMBRE 2019


.........................................................................................................

CARNET DE BORD 

février 2019 - Buenos Aires (Arentina)

"La murga désigne à la fois un genre musical et une formation musico-théâtrale traditionnelle en Uruguay, en Argentine et en Espagne qui évolue dans le contexte des fêtes du Carnaval. 
Le mot "murga", d'origine espagnole, est introduit en Argentine au début du XXe siècle par une compagnie espagnole de zarzuela originaire de Cadix. Un parfait exemple de murga argentine est la chanson Matador du groupe Los Fabulosos Cadillacs. Celle-ci inclut l'usage d'un sifflet, un élément très typique dans la murga argentine.
La murga est un phénomène qui fusionne plusieurs disciplines : la musique, le théâtre, la danse, la poésie et le récital.  
Si elle a des origines noire, elle est avant tout le résultat d'une fusion complexe de différentes cultures. Sur le plan musical les voix sont accompagnées de percussions: la caisse claire, le bombo, ou grosse caisse et les cymbales, jouées à la main à partir de 1915. La murga intègre et fusionne différents rythmes comme la marcha camion (rythme d'origine militaire), le Camdombe ou la Zamba. "
Wikipedia, 29.07.19


...

mars 2018 - Forcalquier (o4) 
retour d'enquête... la complexité est dans les "près"

Je reviens de deux mois "d'errance" entre la Suisse, la Catalogne et la France, durant lesquels j'ai participé au "petit bonheur la chance", à différents rituels collectifs ancestraux (Liebstal, CH) ou contemporains (Carnaval de la Plaine, FR) en continuation à mes recherches carnavlesques.
En parallèle j'ai aussi assisté à des rencontres militantes autour de problématiques qui traversent l'Europe: le contre coup du post-référendum pour l'indépendance de la Catalogne (nov 2017) dans les différents milieux indépendentistes d'une part, et les enjeux légaux pour les personnes facilitant le passage des migrants au col de l'échelle en janvier sous la neige dans des conditions extrêmes, d'autres part...

Des rencontre toujours d'une grande richesse, des complexités variables, multiples, exponentielles dans ces divers contextes.
Je reste perplexe sur ma démarche, sur le sens de ma marche...

Divers.es intellectuel.le.s et artistes occidentaux font l'apologie de la dérive, de l'errance
comme forme de résistance au productivisme, consumérisme, capitalisme dont nous sommes 
à la fois l'arbre et le fruit (parfois pourri et trop souvent encore juteux, créatif, plein d'espoir..).

Quand je vois ces dizaines, centaines de jeunes africains, ou autres réfugié.e.s qui attendent ici et là, penché.e.s sur leurs écrans, - derrière lesquels il.le.s aimeraient 
peut-être ell.eux aussi disparaître, ou parce qu'il.le.s les trouvent plus intéressants que nos rues grises 
et désertes?-, je me répète que faire l'éloge de la dérive ou de l'errance a quelque chose aujourd'hui d'obscène...



18 mars 2018 - Marseille

Alors voilà... des carnavals massifs, 
festifs et politiques ça existe!!



A Marseille, depuis quelques année le carnaval
de la Plaine est un des moments annuels phare
de la mobilisation contre le projet urbanistique 
de gentrification du quartier éponyme.






















18-19 février 2018 - Bâle-Liestal (CH)  



Liestal: carnaval du feu la veille du carnaval de Bâle. 
Des chariots ornés de flammes de plus de 20 mètres de haut léchent les murailles de la ville.
Hommes, femmes et enfants portent sur l'épaule des balots de feu.
Une fête hallucinante... 

"Descente folle des chariots chargés de bûches et de fagots enflammés portés par les habitants. 
Point d'orgue de cette descente endiablée : le passage sous la vieille porte de la cité. 
Une arche, bientôt millénaire, au plafond de bois, que les pompiers sont obligés d'arroser à la lance-
incendie pour éviter que les flammes qui caressent le bois, ne mettent le feu à l'édifice.
Si un chariot de feu poussé à vive allure, sous les encouragements de la foule, rate la porte,
toute la ville brûle.
En 750 ans. il n'y a jamais eu d'erreur de pilotage."




A 5h du matin à Bâle, un autre grand moment collectif et puissant se vit avec pour point de départ alors que la ville grouille dans l'obscurité et le froid... un temps de suspension: 5 min de silence absolu, magique.
C'est le Morgenstreich: un défilé de lanternes, ouverture des festivités qui dureront exactement 72heures non stop.
Des "cliques" déambulent dans les rues de la ville, envahissent les pintes et les commerces. Pendant le carnaval les fifres et tambours résonnent dans toute la ville.

Le schnizelbank est l'une des attractions majeures de ce carnaval. Les schnitzelbanks sont des poèmes satiriques mais amusants sur les erreurs des dirigeants politiques ou économiques de la région et du monde. 






5-15 février 2018 - Barcelone (CAT)



















Carles Puigdemont est toujours planqué en Belgique. 
Les barcelonais.e.s que je rencontre semblent encore un peu sonné.e.s par les évènements dont il.le.s ont été témoins l'automne passé. 
Le parti indépendentiste de Puigdemont qui fit peut-être trembler l'unité de l'Europe avec son bras de fer électorale pour son indépendance, 
reste proche des partis libéraux, constitutionalistes de droite. 
Pour les militant.e.s de la "base"  - dont Barcelone est si riche avec ses innombrables "asembleas de bario", qui fédèrent différentes 
générations et milieu socio-culturels sous des idéaux et des actions depuis la base - la question est complexe...
Ces moins de 24 heures durant lesquelles la Catalogne a été proclamée "République Indépendante" reste une sorte de mythe, 
de rêve, de film nébuleux dont les habitant.e.s se souviennent difficilement et ne savent vraiment que penser.


5-11 janvier 2018 - Briançon (05) 

entraves. graves. gravas. seul(e)s. entraver. honte. désarrois. froid, 
il fait très froid au bord du poèle. chez Marcel. merci. 
jeunes activistes & retraités citoyens: quelles collaborations possibles?. 
marauder. CRS. Centre Réfugiés Solidarité. broder. accueillir. guides 
de haute montagne. humains. contrôles. polices. arrestations. stratégies?. 
urgence. honte.  chaleur humaine. parler. chercher. réseauter. téléphones 
portables. jetables
moi: silence, froid partout dans le coeur
eux: regards, sourires, récits de vie intolérables, inaudibles, attendre, 
attendre, attendre... 
ils disent:"nous sommes entre le marteau et l'enclume", 
impossible de faire marche arrière, impossible d'aller de l'avant.





24 novembre 2017- Forcalquier (04)  
entraves. 
Se remettre en route, nomade, revendiquer le droit à l'errance, condition à ce chantier... 
alors que tout appelle à rester chez soi, au chaud... 

J'entreprends un nouveau voyage "derrivère" qui débutera le 3 janvier 2018.
Je réaliserai 2 mois de résidence dans divers villes de France, Suisse, Espagne, Belgique...
avec des des musicien.ne.s, sociologues, performeuses, costumières...

à suivre... 


24 juillet 2017- Lurs (04)

entr[ê]ves une semaine de résidence au pied d'Aulun. Travail de table, retranscription des enregistrements du voyage de cet hiver... 
Il fait chaud, je mets quand même mes peaux, costumes, véritables artefacts dans cet air caniculaire, alors je lis, et me laisse danser 
sur les mots enregistrés, les sons de cloches, de cris, de chants, de tirs, de foule, de froid, de feu et de neige enregistrés de ci de là.
 ...
L'identité de chaque communauté se définit par ses frontières symboliques, 
celles que l'on ne peut pas franchir dans le quotidien et qui le jour du carnaval peuvent éclater au grand jour... ( frontières: gardiennes d'une "cohésion sociale"? ou croyances inutiles?).
..............................................................................
mardi 28 février 2017 - Zubieta -












Les commentaires sur les réseaux sociaux se déchaînent autour de la sauvagerie des carnavals de Zubieta et Iturren (villages de Navarra). 
Ces deux carnavals fortement ritualisés, riches de symbolisme et de sens attirent des bus de touristes. 
Pour les habitants, il reste le lieu de régulation sociale, ou s'expriment et se dénoncent les abus, les erreurs, 
les "a-moralités" vécues dans le village durant l'année, ou encore l'éternelle confrontation entre les forces 
de la nature et celles de l'homme "civilisé".
Pour les touristes passants décontextualisés, le spectacle semble insupportable. 
Ce carnaval classé "patrimoine culturel immatériel" depuis 2009 est aujourd'hui menacé 
par des associations de protection de l'animal et par le gouvernement espagnol.
ça fait réfléchir....

...................
J'observe l'engouement touristique (chargé d'une quête d'identité généralisée?)
pour ces évènements débridés.
Je cherche en corps s'il n'est que folklore ou besoin grégaire qui s'adapte à son temps.


mardi 21 février 2017 - Donostia -













Samedi 18 février 2017, 160.000 personnes selon la police 
(et 300.000 selon les organisateurs) 
ont manifesté dans les rues de Barcelone 
en faveur de l'accueil des réfugié.e.s et des migrants.
A ce jour manifestation européenne la plus importante  
en faveur des réfugié.e.s.

Cette manifestation s'inscrit dans le mouvement "casa nostra casa vostra"
https://www.casanostracasavostra.cat/en/who-are-we/organization


mardi 14 février 2017 - Barcelone -













Entraeves c'est marcher dans mes empreintes
c'est retrouver Pablo & tous les compagnons de route

... reste ce sentiment de n'être rien dans un monde où rien ne subsiste, 
si ce n'est l'amour des vivants et l'amour des morts...

Claude Mauriac, « Le temps immobile » 


mardi 7 février 2017 - Barcelonne -     

Étymologie:

On trouve environnement en français dès 1265 dans le sens de « circuit, contour » 

puis à partir de 1487 dans le sens « action d'environner ». 

Deux dictionnaires au XIX° siècle attestent un emprunt à l'anglais environment. 

Le mot provient du verbe environner, qui signifie action d'entourer

Lui-même est un dénominatif de environ, qui signifie alentours.

Wikipedia - L'encyclopédie libre -


mardi 31 janvier 2017 - Paris -

 









Entraeves c’est comme le dit Babouilec
"savoir marcher sur le fil tendu entre la frontière des densités
humaines sauve de l’isolement.
Rien dans l’immatérielle de la construction sensorielle ne justifie 

la lecture des codes.

Je suis enregistrée dans une endroit bizarre de la vie et la pensée nourricière poétique 

dans cet espace galope comme un cheval fou."
 

Babouillec , « Algorithme éponyme » , 

mardi 23 janvier - Amsterdam - Hollande













Entr[ê]ves, c'est l'espace -entre-.
C'est celui de la maladie, suspendu, 
quand alités, on ne sait plus quand on reviendra 
à ce corps familier qui fonctionne, se lève, se porte.
C'est l'état horizontal en attente, en latence.
C'est accepter.
C'est ne plus avoir le choix.
C'est faire l'expérience d'un autre corps qui traverse les murs de la chambre, 
qui part au delà du réel, qui délire, qui se permet.
C'est ne plus être maître à bord, ou peut être autre maître à bord.
C'est se laisser posséder par soi même.
C'est s'embrasser.


mardi 17 janvier 2017 - Stuttgart - Allemagne



 









entr[ê]ves...
Une Europe conquérante, violente, avide... pourra-t-elle un jour être en trêve?



 vendredi 13 janvier 2017 - Zurich - Suisse

 

 









entræves, c'est passer et heurter les frontières, conscientes, inconscientes,
sociales, culturelles, linguistiques, humaines, physiques?

L'attribut de la création n'est-il pas de transcender des réalités sociales, culturelles,
physiques, pour accéder à un "au delà" (de nos premières perceptions), inutile,
irrationnel, incompréhensible parfois...



mardi 3 janvier 2017 - Mane (04)- France

entr[ê]ves est une enquête sur les marques d'une Europe aux couleurs hivernales,
un voyage identitaire entre traditions masquées et réalités décharnées.

A la lisière du sauvage puissant, vivant, renaissant et du fantôme mortifère
qui ne sait plus de quoi il se nourrit; constater, prendre notes, sons, images.

Une balade sur nos frontières barbelées et insensées, pour une future restitution publique et subjective.


Qui est l’étranger ?
Celui que l’on rejette, celui derrière lequel on se cache,
ou celui grâce auquel on sent et l'on sait notre contour?
Qui est le sauvage?
Qui est le civilisé?
Qui "peut"?
Qui croit?